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lettres de papier

1 mars 2007

Le plus pénible était quand je voyais ma soeur se

Le plus pénible était quand je voyais ma soeur se faire taper dessus. Je sentais que mes nerfs gonflaient mes forces dangereusement. Il m'arrivait de hurler si fort que je perdais ma voix quelques jours. Je m'accrochais à la poignée d'une porte comme pour empêcher une immense vague de nous emporter loin. Ensuite les muscles de mon bras me faisaient aussi mal que si j'avais soulevé une tonne à bout de bras.

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28 février 2007

Quand j'étais enfant et jusqu'à l'adolescence je

Quand j'étais enfant et jusqu'à l'adolescence je restais enfermée dans ma chambre pendant les vacances scolaires. J'avais un classeur de feuilles à carreaux que je remplissais de poèmes. Chaque jour j'en écrivais au moins deux ou trois que je relisais et corrigeais sans fin. Je ne les faisais lire à personne mais je rêvais de trouver une amie qui les lirait et les aimerait. J'avais souvent envie de pleurer mais je n'osais pas me laisser aller à mes faiblesses parce qu'on ouvrait souvent la porte de ma chambre brutalement et sans prévenir. Sans doute qu'on voulait s'assurer que je ne mettais pas le feu aux draps. Ce manque de sérénité autour de ma profonde solitude accentuait ma tristesse.

18 février 2007

Je me suis rappelé que sa voix au téléphone avait

Je me suis rappelé que sa voix au téléphone avait pris des chemins souterrains. Pendant que je l'écoutais ma pensée vaquait en double file. Il m'avait raconté sa vie comme on ôte ses bottes. C'était comme si je l'avais sous les yeux, à chaque intonation je pouvais presque faire correspondre un arrondi de la bouche ou un geste de la main. En quelques minutes le lien qui me liait se défit. Je ne comprenais plus pourquoi mon pouls s'était emballé. J'étais comme une bille lancée dans le ciel, je me perdais dans les nuages et la peur de retomber mordait mon ventre. La fin de notre conversation a émis un petit clic qui a bouclé dix années. Je me suis allongée pour tout pleurer. Quand j'ai rouvert les yeux la lumière du jour avait jauni les murs de ma chambre. J'avais mal aux yeux mais un gros appétit me souriait comme un fou.

14 février 2007

J'ai beaucoup écrit dans des carnets. Des

J'ai beaucoup écrit dans des carnets. Des montagnes de mots pressés, pressants. Plus je me débarrassais d'eux et plus ils se multipliaient. Je pouvais m'enfermer des jours entiers penchée sur eux. Je ne sentais pas que que mon dos se glaçait dans la nuit tombée. J'oubliais les heures de repas et les heures de sommeil. C'était une époque de sable et de coquillages. J''étais amoureuse de tout ce qui frémissait.

20 janvier 2007

Autrefois j'étais si gênée qu'on me regarde dans

Autrefois j'étais si gênée qu'on me regarde dans la rue que je fixais mes pieds. C'est ainsi que tout doucement je me suis mise à ne plus quitter mes pensées. Elles m'offraient quantité de chemins sécurisants à prendre. J'aimais surtout prendre ces chemins quand il pleuvait. Maintenant, on ne me regarde plus dans la rue. Le monde a pris sa place autour de mon habitude à exister si peu.

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5 janvier 2007

Pendant longtemps j'ai pensé que j'étais une

Pendant longtemps j'ai pensé que j'étais une sorte de petit pot de terre. J'étais optimiste et je me disais qu'il me suffirait de tomber pour qu'on m'aperçoive et me relève. Mais très vite il m'a fallu comprendre que je n'avais pas ce profil. Je n'étais qu'une peau chagrine sur du gravier qu'on foulait au pied. Une peau irritée de ne jamais être frottée.

2 janvier 2007

Un jour je me suis mise sur la pointe des pieds

Un jour je me suis mise sur la pointe des pieds pour regarder la poussière sur l'étagère. Après quelques minutes d'observation patiente je me suis aperçue que ma respiration la déplaçait tout doucement. Ce mouvement lui donnait un reflet irisé. J'ai pensé qu'elle et moi avions en commun la même imperceptible mobilité. Avec le bout de mon ongle j'ai tracé des petits ronds dans cette poussière. Vite épuisée par la station debout à laquelle je n'étais plus habituée, je me suis allongée sur le carrelage froid de la pièce. C'est là que j'ai à nouveau entendu le bruit familier du robinet qui goutte dans l'évier.

23 décembre 2006

Après je suis restée enfermée des mois dans une

Après je suis restée enfermée des mois dans une maison éclairée d'une seule lampe. J'avais fermé tous les volets. Pendant l'été je n'ouvris les fenêtres que la nuit. J'avais rempli un congélateur de pain, de sacs de légumes à cuire et de poisson. J'étais devenue un lézard immobile. Mes provisions me firent plus de deux fois le temps estimé. J'avais oublié ce qu'était l'appétit. J'avais oublié ce qu'était le sommeil et l'éveil. J'avais perdu ma route.

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